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I-A-1. La négociation du contrat
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Mise à jour le 11 février 2022
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I. Le contrat – A. La formation du contrat

 

FICHE I-A-1. LA NEGOCIATION DU CONTRAT

-    Cas dans lesquels la formation du contrat principal est précédée de négociations et/ou d’avant-contrats.

 

1.     La négociation sans contrat (le temps des pourparlers)

1.1.      Principe : la liberté de rompre la négociation

-    Principe : liberté d’ouvrir et de rompre des pourparlers

-    Après la réforme : consécration de ce principe à l’art. 1112 alinéa 1er cciv nouveau: « L'initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelles sont libres. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi ».

-    Limite : l’exigence de bonne foi.  

Cass. 3e Civ., 15 juin 2017 (pourvoi n°16-15.916) La Cour de cassation rejoint la Cour d’appel dans sa décision justifiant que la mauvaise foi de l’une des parties aux négociations suffit à justifier la rupture des pourparlers par l’autre partie, sans que cette rupture puisse être qualifiée d’abusive. 

1.2.     Limite : l'exigence de loyauté dans la rupture de la négociation

a.       Avant la réforme

-    Une liberté de rompre limitée = qui rompt des pourparlers de manière abusive (de façon brutale, avec une intention de nuire etc.) engage sa responsabilité délictuelle (Com., 11 juillet 2000, n°97-18275). Théorie de l'abus de droit.

-   2 cas dans lesquels la rupture est abusive :

  Existence d’une intention de nuire chez l’auteur de la rupture ;

  Auteur de la rupture a agi avec une légèreté blâmable (cas dans lequel pourparlers assez avancés pour laisser penser que le contrat allait être conclu).

Ø  Lorsque les discussions à l’état d’ébauche, l’un des partenaires peut y mettre fin sans avoir à justifier d’un motif légitime de rupture (Com., 20 juin 2000).

Ø  Lorsque la négociation est plus avancée, l’auteur de la rupture doit justifier d’un motif légitime de rupture pour que celle-ci ne soit pas considérée comme fautive (Com. 11 juillet 2000).

-    Sanction : responsabilité délictuelle de l’auteur de la rupture peut être engagée.

-    Dommages et intérêts égaux aux frais engagés lors des négociations par la victime de la rupture abusive donc aux pertes subies (Com., 18 janvier 2011).

!!Attention : la victime de la rupture ne recevra pas d’indemnisation pour gain manqué ou perte de chance car absence de lien de causalité entre les circonstances fautives et l’absence de conclusion du contrat (Com., 26 novembre 2003, n°00-10.243 et 00-10.949, dite "Jurisprudence Manoukian" et Civ. 3ème, 7 janvier 2009 ; Com., 18 septembre 2012). 

b.      Après la réforme

(1)  Obligation de loyauté

-    Art. 1112 al. 1er cciv remplace exigence de bonne foi par exigence de loyauté MAIS, il s’agit d’une consécration du droit antérieur.

-    Conséquence : périmètre de la sanction est plus large que selon le droit antérieur : il y a deux types de faute

  Faute dans le cadre de l’ouverture ou de la conduite des négociations

  Faute dans la rupture des négociations

-    Sanction : Consécration de la JP Manoukian -> Dommages et intérêts égaux aux pertes subies + exclusion de réparation du gain manqué et de la perte de chance.

-     !! L'art. 3 de la loi du 20 avril 2018 consacre totalement la Jurisprudence "Manoukian" en précisant davantage la réparation qu'il faut attendre en cas de faute dans les négociations en modifiant l'art. 1112 al. 2 cciv : « En cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni la perte de chance d'obtenir ces avantages » (version en vigueur au 1er octobre 2018).

Ø  Le préjudice de la victime de la rupture des négociation est donc égal à la perte subie.

(2)  Obligation de ne pas divulguer les informations confidentielles

-    Art. 1112-2 cciv nouveau : obligation de ne pas divulguer des informations confidentielles obtenues dans le cadre de la négociation (consécration JP antérieure). Obligation légale. 

Ø  Paris, 1er févr. 1989: Jurisdata no 1989-020420 : En l'absence de clause de confidentialité, la bonne foi suffit néanmoins à fonder un devoir de secret, une obligation de «réserve et de discrétion».

Cass. com., 31 mars 2021, n° 19-14.533, Assoc. Avea La Poste c/ Sté Iocean : Les circonstances constitutives d'une faute commise dans l'exercice du droit de rupture unilatérale des pourparlers précontractuels ne sont pas la cause du préjudice consistant dans la perte d'une chance de réaliser les gains que permettait d'espérer la conclusion du contrat. Le droit que les partenaires ont de rompre à tout moment des pourparlers précontractuels conduit à restreindre le préjudice indemnisable à celui qui est en relation de cause à effet avec les conditions de la rupture qui seules sont fautives.

2.     Les contrats de négociation

2.1.     Distinction entre contrat de négociations et avant-contrat 

-    Les contrats de négociation ont pour objet d’organiser les conditions de la phase de pourparlers.

-    Les avant-contrats ont pour objet de conférer à l’un des contractants la possibilité de conclure à terme le contrat définitif.

2.2.    Présentation des contrats de négociation

a.       La lettre d’intention

-    Document par lequel des individus manifestent leur intérêt pour un contrat, leur intention d’entamer ou de poursuivre la négociation d’un contrat, dont l’objet, les conditions essentielles et les modalités restent à déterminer.

b.      L’accord de principe

-    Document qui exprime l’accord des parties sur la nature du contrat futur mais dont les éléments objectivement essentiels, le prix par exemple, restent à fixer.

c.       L’accord partiel

-    Partiel, car seuls certains éléments du contrat sont fixés, alors que d’autres restent à déterminer.

2.3.    Conséquence des contrats de négociation

a.       La création d’obligations à l’égard des contractants

(1)  L’obligation générale

-    Une obligation de négocier de bonne foi le contrat en cours de négociation. 

(2)  Les obligations spécifiques

-    La clause de confidentialité : les parties s’engagent à garder le secret sur le principe même de la négociation ou sur les informations transmises à l’occasion de celle-ci. Cour de cassation, Chambre sociale, 15 Octobre 2014 – n° 13-11.524. L'atteinte portée à liberté fondamentale d'exercer une activité professionnelle justifie l'existence d'une contrepartie financière. Une clause de discrétion ne saurait porter atteinte à cette liberté en devenant, de facto, une clause de non concurrence.

-    La clause de sincérité : chaque partie s’engage à révéler à l’autre toute autre négociation qu’il entreprendrait avec un tiers.

-    La clause d’exclusivité : les parties s’obligent à ne pas entreprendre des négociations parallèles avec des tiers pendant la durée de leur négociation. Le règlement européen nº 330/210 du 20 avril 2010, limite à cinq ans la durée d'une clause d'exclusivité

b.      La sanction de l’inexécution des obligations

-    Auteur de la faute engage sa responsabilité contractuelle

-    Sanction de principe : uniquement dommages et intérêts

-    Limite : le cas de l’accord partiel, il faut distinguer :

  si l’accord partiel ne porte que sur des éléments qui sont objectivement accessoires du contrat négocié.

En cas de rupture = uniquement dommages et intérêts.  

  si l’accord partiel porte sur les éléments objectivement essentiels du contrat négocié.

En cas de rupture = exécution forcée du contrat possible

Ø  le juge pourra dire que le contrat est réputé formé en raison de l’accord des contractants sur les éléments essentiels et il complètera le contrat pour les éléments non essentiels.

-    « Limite de la limite » : les contractants peuvent « essentialiser » des éléments objectivement secondaires de leur accord

En cas de rupture = uniquement dommages et intérêts.